L’ancien président algérien a été enterré au cimetière d’El Alia, au côté des héros de l’indépendance. Aucun deuil national n’a été annoncé, témoignant de l’embarras du pouvoir en place.
Il reposera au carré des martyrs du cimetière d’El Alia, à Alger. Abdelaziz Bouteflika a été inhumé, dimanche 19 septembre, au côté des héros de la guerre d’indépendance. La cérémonie d’inhumation a commencé après la prière du Dohr (après 13 heures, heure locale, midi à Paris), en présence du président algérien Abdelmadjid Tebboune, des membres du gouvernement et de diplomates étrangers. Emmanuel Macron a, dans un communiqué publié par l’Elysée dimanche, salué une « figure majeure » de l’Algérie et « un partenaire exigeant pour la France ».
L’ancien président algérien, chassé du pouvoir en 2019 après vingt ans à la tête de l’Algérie, s’est éteint vendredi, à l’âge de 84 ans, dans sa résidence médicalisée de Zéralda, à l’ouest d’Alger, où il vivait reclus depuis deux ans et demi.
Il était prévu que sa dépouille soit auparavant exposée au Palais du peuple, bâtiment d’apparat du centre d’Alger, pour permettre à de hauts dignitaires et aux citoyens de lui rendre un ultime hommage. Les corps des prédécesseurs de Bouteflika – et même son ancien chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah – ont tous été exposés dans ce bâtiment d’apparat avant d’être enterrés.
Selon l’Agence France-Presse (AFP), le cortège funèbre est cependant parti directement de Zéralda vers le cimetière d’El Alia, à une dizaine de kilomètres de là, sans passer par le Palais du peuple. Le moment de recueillement aurait été annulé, signe d’un certain embarras du pouvoir en place.
Drapeaux en berne
C’est au carré des martyrs du cimetière El Alia que reposent tous ses prédécesseurs, aux côtés des grandes figures et martyrs de la guerre d’indépendance (1954-1962). Depuis l’annonce de la mort d’Abdelaziz Bouteflika, qui a suscité des réactions embarrassées des autorités algériennes, l’incertitude planait sur le lieu où il allait être enterré et sur l’organisation de ses funérailles. Affaibli et aphasique à la suite d’un AVC subi en 2013, M. Bouteflika avait été contraint à la démission le 2 avril 2019, après près de deux mois de manifestations massives du mouvement prodémocratie Hirak contre son intention de briguer un cinquième mandat d’affilée.
Au terme de plusieurs heures de flottement sans réaction officielle, le président Abdelmadjid Tebboune, qui fut premier ministre sous Bouteflika, a décrété, samedi midi, dans un communiqué, la mise en berne du drapeau national « pendant trois jours », pour honorer « l’ancien président, le moudjahid [combattant de l’indépendance] Abdelaziz Bouteflika ».
Hommages limités
Les anciens chefs d’Etat avaient été enterrés avec les plus grands honneurs, à l’instar du premier président de l’Algérie indépendante, Ahmed Ben Bella (1963-1965), qui eut droit à des funérailles solennelles à sa mort, en avril 2012. M. Bouteflika, qui avait alors décrété un deuil national de huit jours, avait personnellement accompagné le cercueil du Palais du peuple, où la dépouille avait été exposée, jusqu’au cimetière d’El Alia, en présence de toute la classe politique et des hauts dirigeants du Maghreb.
Le troisième président d’Algérie (de 1979 à 1992), Chadli Bendjedid, à l’origine de la démocratisation des institutions, avait également été enterré avec tous les honneurs en octobre 2012, et un deuil national de huit jours fut aussi décrété à sa mort.
Signe, là encore, de l’embarras des autorités, les médias officiels n’ont évoqué que par des brèves la disparition du président déchu, sans lui consacrer d’émissions spéciales, contrairement à ses prédécesseurs. Ce n’est que samedi soir que la télévision d’Etat a évoqué, quoique brièvement, dans son journal télévisé les principales étapes du parcours politique de près de soixante ans de l’ex-président.
Les atermoiements autour de l’organisation des obsèques illustrent aussi, selon des observateurs, des craintes de manifestations hostiles contre un président à l’image ternie. Le frère de M. Bouteflika, Saïd, actuellement en prison pour des accusations de corruption, a été autorisé à assister aux funérailles, selon son avocat, Salim Hadjouti.